13 Novembre : une fausse victime condamnée à quatre ans et demi de prison

Une femme a été condamnée jeudi à quatre ans et demi de prison pour s’être fait passer pour une victime des attentats du 13 novembre. Un "deuxième traumatisme" pour les victimes, causé par quelqu’un qui "avait besoin d’exister".

Assises serrées aux premiers rangs dans la salle du tribunal correctionnel de Créteil (Val-de-Marne), les vraies victimes écoutent, tantôt effarées, tantôt prises d’un rire nerveux, les explications de "Flo", qu’ils ont côtoyée pendant deux ans au sein de l’association de victimes des attentats Life for Paris.

Avec cette bénévole - elle sera ensuite embauchée en CDD - ils ont partagé nombre d’"apéros-thérapies", et posé pour les photos d’articles consacrés aux victimes et à leurs proches.

Une femme de 49 ans aux cheveux roses qui vit chez sa mère

Depuis le box des accusés, cette femme de 49 ans aux cheveux roses, qui restera impassible tout au long de l’audience, avait commencé par leur présenter ses excuses, sans les regarder. L’escroquerie débute en décembre 2015, quand elle rejoint Life for Paris, tout juste créée. Elle s’y présente comme une proche de victime : son meilleur ami, "Greg", a été grièvement blessé par des tirs de Kalachnikov, aux jambes et à l’abdomen, lors de l’attaque du Bataclan.

Charismatique, de bonne volonté et très investie, elle se rendra vite "indispensable" à l’association, entrera au comité d’administration jusqu’à en devenir la secrétaire, avant d’être embauchée en CDD pendant neuf mois en 2017. "Greg" lui, échange sur la messagerie Facebook avec plusieurs membres de l’association, dont une victime, avec qui se noue une relation sentimentale. Sauf que, rappelle la présidente, "personne n’a vu cet homme, il est inconnu des listes de victimes".

"Elle n’a pas de vie"

Les enquêteurs se rendront compte que la messagerie de "Greg" est liée au compte Facebook de "Flo", et que leurs mots de passe sont les mêmes. "Un personnage imaginaire, créé de toutes pièces" par l’affabulatrice, avancera la procureure. Mais elle maintient, alors que dans la salle les victimes secouent la tête : "oui, il existe".

L’expertise psychologique n’a pas montré de pathologie avérée, mais un "problème dans son rapport à la loi, et à la vérité". "Flo" souffre aussi d’un "manque à être". "Elle n’a pas de vie, elle vit chez sa mère à 50 ans... Elle avait besoin d’exister", dira son avocate, qui plaidera pour des soins psychologiques plutôt qu’une peine de prison.

La procureure voit elle une femme qui, dans un contexte "synonyme d’horreur, d’enfer", et "telle une araignée qui tisse sa toile" se "crée un personnage de toutes pièces". Cela pour obtenir la confiance des membres de l’association et avoir accès à des documents "indispensables" - des récits des victimes et des justificatifs - qui lui permettront de se faire reconnaître, pour elle-même cette fois, le statut de victime des attentats.

Les balles qui lui "sifflaient aux oreilles"

Elle se déclare victime du Bataclan en février 2016. Dans sa plainte, elle fait un "récit glaçant" de la soirée, raconte les balles qui lui "sifflaient aux oreilles". Des mots qu’elle a emprunté aux vraies victimes, en fabriquant un "patchwork" des plaintes auxquelles elle a accès à l’association, assure l’avocate de Life for Paris.

Elle fera aussi des copies de justificatifs, dont une facture de concert. Grâce au statut de victime, qu’elle obtient en avril, elle touchera 25 000 euros du Fonds de garantie des victimes de terrorisme et autres infractions pénales (FGTI) et plus de 13 000 euros de l’assurance maladie, qu’elle a été condamnée jeudi à rembourser.

"Ça relève des problèmes psy", s’est-elle défendu, mentionnant également "des difficultés financières". Elle sera démasquée et dénoncée aux autorités par l’association à l’automne 2017. Pour les membres de Life for Paris, dont la confiance a été trahie, "c’est un deuxième traumatisme", dira leur avocate.

Source : Midi Libre
Auteur : La Rédaction
Date : 23/03/2018

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