Attentat de Nice : deux enquêtes judiciaires en cours

L’une porte sur les complicités dont a bénéficié le terroriste -huit personnes sont mises en examen-, l’autre sur les conditions de sécurité avant l’attentat.

« C’est un monstre. Je n’ai jamais remarqué qu’il était dans la religion. Il était menteur, voleur. […]. Il mangeait du porc, de tout. Il disait qu’il s’appelait Salomon parce que les filles n’aimaient pas le prénom de Mohamed. » Voici comment l’auteur de l’attentat de Nice est décrit sur procès-verbal par sa propre tante. Le 14 juillet 2016, en lançant son camion dans la foule, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, 31 ans, transformait la promenade des Anglais en cimetière, faisant 86 morts et plus de 400 blessés.

Deux ans après les enquêteurs n’ont toujours pas trouvé de trace reliant l’assaillant à Daech, qui avait pourtant revendiqué l’attaque 36 heures plus tard. « Une revendication opportuniste », commente un policier antiterroriste, précisant : « l’État islamique avait reconnu pour la première fois comme l’un de ses soldats l’auteur d’une action isolée alors que celui-ci n’avait fait aucune déclaration d’allégeance préalable. »

Un suspect s’est suicidé en juin

Les enquêteurs peinent tout autant à déterminer une complicité terroriste. Même si Mohamed Lahouaiej Bouhlel a sans aucun doute été soutenu dans sa folie par son entourage, aucun élément à ce jour n’atteste qu’un seul de ses proches aient pu connaître son dessein funeste. « C’est lui, tout seul, qui loue le camion, le conduit, et fait les repérages », résume une source proche de l’enquête. « Lahouaiej n’était ni respecté, ni pris au sérieux, certains ont même essayé de lui fournir de fausses armes. »

Neuf personnes ont été mises en examen dans ce dossier pour « association de malfaiteurs terroristes criminelle ». L’un d’entre eux, un Albanais, soupçonné d’avoir indirectement fourni un pistolet et une kalachnikov au terroriste, s’est suicidé début juin en cellule, tandis que Enkeledja Z, la seule femme du dossier, a été remise en liberté sous contrôle judiciaire.

Polémique sur le dispositif de sécurité

Une seconde enquête, plus sensible celle-ci, concernant le dispositif de sécurité mis en place le soir du 14 juillet, s’est accélérée. Ces derniers mois, des dizaines de policiers et d’agents municipaux ont été interrogées pour « mise en danger d’autrui », comme le réclamait Me Yassine Bouzrou, l’avocat des parents de Yanis, enfant de 4 ans décédé dans l’attentat.

Après avoir classé une vingtaine de plaintes, le parquet de Nice s’était opposé à l’audition des fonctionnaires et des agents de la Ville. Mais les juges, Chemama et Russo, chargés de l’instruction, sont passés outre.

La polémique opposant la mairie de Nice au ministère de l’Intérieur est loin d’être close. Le litige porte sur l’estimation du risque terroriste, la répartition des fonctionnaires ou les raisons de l’absence de plots en béton. Les moyens humains et matériels mis en place le soir du 14 juillet étaient très inférieurs à ceux de l’Euro 2016. Les juges cherchent à savoir si la sécurité a été négligée et, si oui, est-ce par faute de moyens ou par insouciance…


Source : Le Parisien
Auteur : Jean-Michel Décugis
Date : 14/07/2018

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