« Pour éviter une catastrophe,il faut beaucoup de courage politique »

Avec un collègue sénateur des Pyrénées Orientales, le socialiste Christian Manable est le rapporteur d’un travail réalisé sur la tempête Xynthia, en 2010. Il est revenu sur ses préconisations, le 6 mai, à Abbeville, à l’invitation de l’association Pour le littoral picard.

« Bien, mais peut mieux faire. » Le sénateur socialiste Christian Manable, ancien président du Département de la Somme (2008-2015), emprunte au jargon de l’enseignant qu’il fut, les mots pour analyser ce qui a été entrepris depuis la catastrophe de la Faute-sur-Mer, en Vendée. C’était dans la nuit du 27 au le 28 février 2010.

La tempête Xynthia a fait 47 morts, dont 29 par submersion dans cette cuvette située en dessous du niveau de la mer, et en proie à une urbanisation échevelée au mépris de toute règle. Un procès en correctionnelle a sanctionné les responsables de dysfonctionnements en matière de gestion des risques, en décembre 2014. Ces décisions font l’objet d’appels en cours.

« Ça nous pend au nez ! »

Christian Manable a travaillé avec son collègue sénateur des Pyrénées-Orientales, François Calvet (Les Républicains), cinq ans après cette catastrophe, pour établir un diagnostic de ce qui a été réalisé et faire des préconisations.

Cette synthèse fait l’objet d’un rapport d’information d’une centaine de pages, sous le titre Xynthia, 5 ans après : pour une véritable culture du risque dans les territoires.

Le samedi 6 mai, à Abbeville, Christian Manable était l’invité de l’association Pour le littoral picard, qui s’intéresse de près aux questions environnementales maritimes. Il a présenté ce travail, non sans faire allusion à la côte picarde. Le parlementaire considère que la Somme « n’est pas à l’abri d’une catastrophe. Ça nous pend au nez. Pour éviter ça, il faut beaucoup de courage politique.  »

L’ancien président du Département regrette ainsi « l’abandon du projet de dépoldérisation du hâble d’Ault  », qui consiste à rendre à la mer ce qu’on lui a pris, permettant de soulager la pression pesant notamment sur Cayeux-sur-Mer. Il fustige « la logique Shadock du rechargement en galets  », par apport de la zone nord vers le secteur sud de Cayeux, via des norias de camions. Présenté en dix recommandations, le rapport de ces parlementaires préconise trois axes de travail qui traduiraient une véritable culture du risque.

« Aider les élus à appréhender ces questions »

La première de ces pistes est de mieux préparer les habitants et les élus locaux aux risques. Par exemple, par un déploiement généralisé des repères de crue, « qui s’inscrivent dans la mémoire des hommes  », car « l’oubli succède rapidement à l’émotion  ».

Une deuxième recommandation plaide en faveur d’«  une responsabilisation des citoyens  », pouvant passer par un malus en cas d’absence de prévention, sous le contrôle commun de l’État, des collectivités et des assureurs. Autre suggestion : fournir aux préfectures des moyens humains et financiers pour aider les maires à mieux appréhender ces questions de risque. Cela peut passer par la nomination d’un « Monsieur risque naturel ». Informer systématiquement les conseils municipaux sur ces questions en tout début de mandat, faire de la pédagogie de ces risques auprès des enfants constituent d’autres recommandations. Pour les deux parlementaires, il est urgent également de «  clarifier la planification urbaine et l’aménagement des zones à risques. Un travail de simplification des textes et des normes doit être engagé. La complexité administrative est asphyxiante. Elle brouille le message  », considère Christian Manable. « Rien ne se fera sans la diffusion d’une véritable culture du risque dans les territoires, pour que chacun devienne acteur de sa propre sécurité  », concluent les deux sénateurs.

L’alerte forcée par SMS

Pour les deux parlementaires qui ont travaillé sur l’après Xynthia, l’amélioration de l’alerte et de la transmission des appels d’urgence est primordiales. Ils préconisent qu’elle passe par le déploiement d’un dispositif appelé « self broadcasting », en vigueur, par exemple, aux Pays-Bas et en Israël. Il s’agit d’un système d’alerte par SMS, fonctionnant même quand les réseaux sont saturés. « Le canal ne peut pas être coupé par l’utilisateur. La diffusion de ces messages rallume automatiquement les portables éteints pour transmettre l’information », explique Christian Manable.

Source : courrier-picard.fr
Auteur : V.H.
Date : 13 mai 2017

Crédit photos : Source : courrier-picard.fr Auteur : V.H. Date : 13 mai 2017

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