Un an après le déraillement du TGV Est, rescapés, proches et témoins se confient

Cela fait un an ce lundi que la rame d’essai du TGV Est a déraillé, faisant 11 morts et 42 blessés. Une cérémonie d’hommages aux victimes est organisée en Alsace, alors que l’enquête n’est pas terminée.

Il est un peu plus de 15h, l’après-midi du 14 novembre 2015. L’une des rames d’essai du TGV Est parcourt la voie ferrée de la commune d’Eckwersheim, dans le Bas-Rhin, à une vitesse anormalement élevée. Le train, qui transporte sept personnes dans la cabine de pilotage, au lieu des quatre autorisées, roule à 276 km/h au lieu des 176 km/h préconisés. Après avoir abordé une courbe, il déraille en amont d’un pont, et termine sa course dans le canal. Onze personnes décèdent sous la violence du choc et 42 sont blessées. Les images de la rame, à moitié immergée dans le canal, sont impressionnantes. Une cérémonie d’hommage aux victimes a lieu, ce lundi, sur les lieux du déraillement.

"Tout s’est passé tellement vite que je n’ai pas eu le temps de réaliser qu’on était en train d’avoir un accident. J’ai juste senti que la rame basculait. J’ai entendu comme un bruit de machine à laver, puis j’ai perdu connaissance", relate ce lundi Jérôme (prénom d’emprunt), un salarié de Systra, interrogé par France Info. Cet homme de 29 ans, qui se trouvait dans la cabine de pilotage, a eu un bras cassé et une fracture ouverte de la hanche lors du choc.

"Je n’arrive pas à dormir à cause des médicaments"

Il raconte qu’il a dû attendre 30 minutes avant d’être pris en charge. "Les secours ont dû faire le tour des rames. Quand les pompiers sont arrivés à ma hauteur, ils m’ont donné des médicaments pour la douleur... Je me suis réveillé à l’hôpital". Jérôme y est resté cinq semaines, précise France Info, mais les jours suivants seront tout aussi difficiles. Il n’a toujours pas repris le travail. "Je n’arrive pas à dormir à cause des médicaments que je prends. Du coup, je repense à l’accident. Ça n’aide pas. C’est toujours compliqué", détaille le jeune homme qui sera présent, ce lundi, lors de la cérémonie d’hommage aux victimes.

Robert Pfimmer et Raphaël Ebersold, tous les deux interrogés ce lundi par France Bleu, étaient près du canal, le 14 novembre, lorsque la rame a déraillé. Ces deux riverains ont vu le TGV plonger dans l’eau. "Il y avait des wagons qui étaient éparpillés sur les prés (...), relate Robert Pfimmer, ancien maire d’Eckwersheim, qui habite près du canal. A ce moment-là, une porte s’est ouverte et un homme est descendu. Je lui ai demandé : ’vous êtes combien à bord, sept, huit ?’ Il m’a répondu ’50’. J’ai failli tomber à la renverse".

"On roulait trop vite"

"La deuxième chose qu’il m’a dite c’est : ’On roulait trop vite, il en avait lui-même la sensation’", se souvient l’ex-édile. Comme lui, Raphaël Ebersold, qui passait près du lieu de l’accident avec son frère, a aidé des blessés à s’extraire de la rame. "Au lendemain des événements de Paris, on a cru que c’était des attentats. En se rapprochant, on a vite vu que c’était un déraillement", indique-t-il à France Bleu. "Ce qui m’a surtout marqué, ce sont les enfants, continue le jeune homme. Une petite fille est sortie à l’arrière du train, elle n’arrêtait pas de dire : ’où est mon papa, où est mon papa ?’ Il était blessé à la tête".

Un an après, l’enquête n’est pas encore achevée, mais les rapports successifs pointent du doigt la responsabilité de l’équipe de pilotage et de la filiale de la SNCF chargée des essais, Systra, dans la vitesse excessive de la rame. Un salarié de cette filiale et deux de la SNCF ont été mis en examen pour homicide involontaire mi-octobre.

"Elle pensait qu’il s’agissait d’un voyage inaugural"

Le 14 novembre 2015, le train transportait des invités non-autorisés par le règlement. En plus des trois personnes qui se trouvaient en trop dans la cabine de pilotage, des salariés de la SNCF avaient illégalement invité d’autres proches, qui se trouvaient dans la rame de test. Onze des 53 passagers du TGV, dont deux des invités non-autorisés, quatre agents de la SNCF et cinq salariés de Systra, sont morts lors du déraillement.

Parmi ces invités décédés, figure Fanny Mary. Un an après, sa famille ne comprend toujours pas pourquoi elle s’est retrouvée dans cette rame. "Ma petite soeur, confiante, s’est retrouvée à bord de ce train suite à une invitation. Elle pensait qu’il s’agissait d’un voyage inaugural. C’était en fait un train qui roulait pour la première fois à cette sur-vitesse", affirme Jules Mary, le frère de Fanny, dans une interview donnée à 20Minutes. "Fanny n’avait absolument rien à faire sur cet essai. Elle ne savait pas qu’il n’y avait jamais eu le moindre essai à cet endroit, sur cette voie, dans ce sens, à cette vitesse", ajoute son frère, Arthur. La famille de la jeune femme est très attentive aux avancées de l’enquête. "Il y a bien sur la question du deuil, mais par respect pour les morts, on ne peut pas renoncer à comprendre ce qui a causé leur disparition", affirme Arthur.

Source : lexpress.fr
Date : 14/11/2016

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